Grandir dans l’ombre (Ranking of Kings S01)

“C’est ma faute, c’est moi qui ait étouffé toute forme en lui d’assurance”. Ce qu’exprime la mère de Boji, le jeune garçon muet dans Ranking of Kings, d’autres parents l’ont pensé avant elle. Et cette histoire universelle continuera de parler à beaucoup pour les décennies qui suivront. Elle est la malédiction de chaque être humain. Là où réside l’intelligence du message qu’offre cet animé de 23 épisodes, loin d’être un fardeau, ce manque de confiance en nous est présenté comme le combat d’une vie. Nous comprenons en substance que Kage, l’ombre qui accompagne Boji est un talisman qui lui permet de s’émanciper de sa condition d’enfant pour devenir un homme, respecté et compris.

Apprendre à se connaître pour se faire comprendre, c’est l’étape de notre enfance la plus difficile car la plus longue à passer. Quand nous grandissons, nous ne connaissons pas nos forces mais plutôt nos faiblesses qui sont mises en perspective par nos rencontres. Quand le frère aîné de Boji est couronné roi, lui se retrouve en exil, loin de ceux et celles qu’il a cotoyé.e.s. Cet animé suit une trame logique du roman d’apprentissage, celle que Voltaire a très bien mis en lumière dans Candide, des péripéties qui viennent ternir l’existence somme toute banale d’un personnage, ou d’un individu si on la compare à la nôtre.

Pour aller un peu plus loin que les stéréotypes classiques des récits d’aventure, Ranking of Kings décide de ne pas se reposer que sur son héros ni même que ses allié.e.s. Non, ce sont ses ennemis qui prennent une place très importante, jusqu’à sa nemesis invincible qui est un des méchants les plus redoutables qui soit. Finalement, personne n’est épargné dans ce dessin animé et chacun.e vit avec des regrets, qu’iel possède une belle âme ou un mauvais fond en apparence. Difficile de ne pas y voir un parallèle avec la société actuelle dans laquelle nous existons. Cette absence d’universalité dans notre enfance ne nous permet pas de nous émanciper de la même façon, alors, chacun.e choisit ses armes pour se défendre, comme Boji lors d’un épisode (le 7e) qui restera dans les annales du dessin animé par son choix narratif de cacher l’entraînement.

Nous pouvons être le mieux entouré.e.s possible, il n’empêche que selon nos rencontres, nous ne sommes pas sûr.e.s d’emprunter le bon chemin. A la croisées de nos destins, notre envie de grandir reste une illusion tant que le but n’est pas atteint. “J’ai encore plein de possibilités devant moi. » dira Kage dans un des nombreux passages émouvants de l’anime. Ainsi, même parent, nous avons encore à apprendre, la reine mère de Boji le découvre à chaque épisode où elle apparaît. Son gigantesque père a lui aussi ses failles qu’il tente de résorber car personne n’est épargné.

Ranking of Kings nous rappelle par sa galerie de personnages et les émotions qui s’en dégage qu’un destin n’est pas figé mais que c’est bien à nous de le prendre en main malgré toutes les difficultés. Prenez-le comme vous le voulez, trouvez-y les messages qui vous rassurent et montrez le à des ami.e.s, Boji vous accompagnera comme d’autres héros et héroïnes l’ont fait avant lui; je pense évidemment à Picsou et sa bande qui passent autant de temps à se comprendre entre eux qu’à chercher le trésor à chaque aventure. Je n’oublie pas non plus Batman qui apprend à vivre avec sa noirceur intérieure à chaque épisode. Iels sont des allié.e.s face à un ennemi que nous ne savons pas toujours nommer, celui là-mème qui reste une des plus grandes difficultés à résoudre en vieillissant.